UN CAMEROUNAIS, PREMIER AFRICAIN À LA TÊTE DU PATRIMOINE MONDIAL DE L’UNESCO
Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco vient de nommer le nouveau directeur du patrimoine mondial de l’Unesco, qui pour la première fois est un Africain. Lazare Eloundou Assomo, 53 ans , Camerounais, dirigeait jusqu’alors le secteur « Culture et situations d’urgence » au sein de l’Unesco. L’année prochaine, la Convention du patrimoine mondial de l’Unesco signée par 193 États fêtera ses 50 ans.
1 154 sites sont actuellement inscrits sur la liste du patrimoine mondial. Pour Lazare Eloundou Assomo, nouveau directeur du patrimoine mondial, il reste encore beaucoup à faire : « Beaucoup de régions dans le monde ne sont pas suffisamment représentées, notamment l’Afrique et les petits États Insulaires. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas de Tour Eiffel que les sites ne sont pas importants ou n’ont pas de valeur universelle exceptionnelle. Nous allons lancer un dialogue avec tous les États pour corriger ce déséquilibre. »
Lazare Eloundou Assomo a quitté le Cameroun à 17 ans pour suivre des études d’architecte et d’urbaniste en France. Il débute sa carrière en tant que chercheur associé au Centre international de la construction en terre de l’école d’Architecture de Grenoble en 1996. Ses premiers pas professionnels le portent en Afrique du Sud où il réalise des logements dans des townships. Son travail est salué par Nelson Mandela, qui se déplace sur le chantier où il travaille. « Une belle surprise, se souvient-il, et un moment qu’on oublie pas dans une vie. Il m’a invité à boire un thé car la façon que nous avions de travailler avec les communautés afin de répondre à leurs besoins correspondait à sa façon de faire. »
Lazare Eloundou Assomo rejoint l’Unesco en 2003. Il contribue à la création du Fonds pour le patrimoine mondial africain et coordonne plusieurs projets de restauration patrimoniaux en Afrique, notamment au Mozambique (la forteresse du site du patrimoine mondial d’Ilha), en Ouganda et au Mali. On lui doit l’ouvrage « Patrimoine mondial africain : une diversité remarquable », co-écrit avec Ishanlosen Odiaua et publié en 2012 par l’Unesco.
Au Mali, entre 2013 et 2016, il dirige le bureau de l’Unesco à Bamako, avec pour mission de reconstruire, de réhabiliter et de resacraliser les mausolées de Tombouctou détruits par les jihadistes. Un vaste chantier entrepris avec les savoir-faire des différentes communautés, dans des conditions de sécurité difficiles. La réussite de ce chantier patrimonial de l’Unesco a valu à Lazare Eloundou Assomo d’être décoré de la médaille de Commandeur de l’ordre national du Mali, à titre étranger. Cette mission malienne aura permis pour la première fois de faire reconnaître la destruction du patrimoine mondial comme un crime de guerre. Pour la première fois, la mission de maintien de la paix au Mali a eu pour mandat de protéger la culture. Une victoire.
La Convention du patrimoine mondial de l’Unesco a 50 ans. Et maintenant ?
D’autre défis attendent le nouveau directeur du patrimoine mondial, qui occupait depuis 2018 le poste de directeur « Culture et situations d’urgence ». L’occasion déjà de se pencher sur plusieurs chantiers cruciaux : les conflits dévastateurs, les désastres et la restitution des biens culturels au titre de la Convention de 1970. Si la restitution de biens culturels s’opère d’État à État, beaucoup de sites du patrimoine mondial ont des musées qui vont accueillir des objets restitués.
Concilier patrimoine et développement mais aussi s’adapter au réchauffement climatique s’ajoutent aujourd’hui à la longue liste des défis à relever. « On voit beaucoup d’incendies, d’inondations, l’avancée du désert menacent les sites », confie Lazare Eloundou Assomo.
En 2022, la Convention pour le patrimoine mondial fêtera son demi- siècle. « Il ne s’agira pas uniquement de célébrer le nombre de sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial », assure Lazare Eloundou Assomo, mais plutôt de s’interroger et de faire un bilan. Qu’a -t-on réussi à faire depuis cinquante ans ? Où en sommes- nous aujourd’hui ? Le patrimoine mondial a, plus que jamais, toute sa place pour favoriser la paix et la coopération par la culture.