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LA FRANCE VA RESTITUER LES BIENS MAL ACQUIS AUX AFRICAINS

Les députés français ont achevé, dans la nuit du vendredi 19 au samedi 20 février, l’examen en première lecture du projet de loi « de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ». A cette occasion, ils ont voté à l’unanimité un amendement du député M’jid El Guerrab, ex-La République en marche et désormais Agir ensemble, qui inscrit pour la première fois dans la loi le principe de la restitution des « biens mal acquis » à la population des pays concernés.

Il s’agira de redistribuer, sous forme d’aide au développement, les fonds confisqués par la justice française lors d’une condamnation pénale dans le cadre d’une affaire de corruption, détournement de fonds ou autre prise illégale d’intérêts par une personne dépositaire de l’autorité publique d’un Etat étranger, chargée d’un mandat électif public ou d’une mission de service public. Le gouvernement a fait préciser dans le texte que les recettes issues des biens mal acquis seraient identifiées par une ougverture de crédits dans la mission « aide publique au développement », gérée par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères.

Actuellement, les fonds confisqués, quelles que soient la nature de l’infraction et la nationalité de son auteur, sont gérés par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) et reversés pour l’essentiel au budget général de l’Etat. Autrement dit, les populations spoliées par la corruption de leurs dirigeants ne voient pas la couleur de cet argent récupéré par la justice. Or, la convention des Nations unies contre la corruption, dont la France est signataire, pose comme principe général la coopération et l’assistance entre Etats pour permettre la restitution d’avoirs illicites.

La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi par la défense, pourrait trancher définitivement dans les prochains mois le feuilleton des biens mal acquis par le vice-président de la ­Guinée équatoriale, Teodorin Obiang. Condamné pour blanchiment d’argent en ayant détourné quelque 150 millions d’euros entre 1997 et 2011, il a vu ses innombrables biens (dont un hôtel particulier avenue Foch et 17 voitures de luxe) confisqués.

L’immeuble, utilisé par Teodorin Obiang, vice-président de Guinée équatoriale depuis 2016, a fait l’objet d’une perquisition et d’une saisie à titre conservatoire en 2012 dans le cadre de l’enquête sur les biens mal acquis.

Teodorin Obiang, le vice-président de la Guinée équatoriale, a effectivement été condamné en février 2020 par la cour d’appel de Paris à trois ans de prison avec sursis et 30 millions d’euros d’amende pour blanchiment d’abus de biens sociaux, blanchiment de détournement de fonds publics et blanchiment d’abus de confiance.

La Cour Internationale de Justice  avait  également confirmé la confiscation de l’ensemble des biens saisis dans ce dossier, dont l’hôtel particulier de l’avenue Foch. La CIJ, qui règle les différends entre Etats, avait validé cette interprétation, estimant que l’immeuble du 42, avenue Foch, n’a jamais acquis le statut des locaux d’une mission diplomatique.

Si la loi est inchangée d’ici la décision de la haute juridiction, ces 150 millions d’euros iront directement dans les caisses de Bercy. Les affaires de bien mal acquis n’intéressent pas que la Guinée équatoriale . Des personnalités de la République du Congo (famille de Denis Sassou-Nguesso), du Gabon (clan de l’ancien président Omar Bongo) ou de la Syrie (Rifaat Al-Assad) ont été mises en cause.

La France a pour le moment préféré commencé des négociations à huis-clos dans le cadre d’une Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC), sorte de « plaider coupable », offrant malheureusement beaucoup moins des garanties d’exemplarité et de transparence.

A titre d’indemnisation, la France a ainsi restitué à l’Ouzbékistan qui s’était constitué partie civile dans le cadre de cette CRPC, une première tranche de 10 millions d’euros correspondant au produit de la vente de l’un des immeubles de Gulnara Karimova. Malgré l’importance des sommes en jeu et les soupçons sur l’implication de plusieurs haut-fonctionnaires ouzbeks dans les schémas de corruption litigieux, la France n’a fourni aucune information sur le processus de restitution tandis que les autorités ouzbeks n’ont fait qu’indiquer que ces fonds allaient être « transférés dans le budget d’Etat de l’Ouzbékistan ».

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