LA GUERRE COMMENCE DANS LE CAMP D’ALASSANE OUATTARA SUR SON TROISIÈME MANDAT
Alors qu’il s’exprimait devant les parlementaires du Sénat et de l’Assemblée nationale réunis en congrès extraordinaire le 5 mars 2020, Alassane Ouattara, 76 ans, dont neuf passés à la tête de la Côte d’Ivoire, avait publiquement annoncé qu’il ne briguerait pas pour un nouveau mandat. « Je voudrais vous annoncer solennellement que j’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 […] et de transférer le pouvoir à une jeune génération. » Avant d’introniser son Premier ministre Amadou Gon Coulibaly comme candidat du parti au pouvoir, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).
Maintenant que le dauphin désigné est mort, Alassane Ouattara qui n’a pas prévu de plan B est dans l’embarras. A peine les funérailles du premier ministre passées, deux dirigeants du parti présidentiel ont pris position publiquement en faveur d’une candidature du chef de l’Etat pour un troisième mandat. « Le seul choix qui vaille, c’est que le président Ouattara reprenne le flambeau », a déclaré dimanche sur TV5 le directeur exécutif du RHDP et ancien ministre, Adama Bictogo. Il l’a répété le lendemain sur RFI : « A trois mois de la présidentielle, il nous est difficile de sortir du chapeau un nouveau leader. Le président Ouattara reste le grand rassembleur. »
Le porte-parole du RHDP, Kobenan Kouassi Adjoumani, est également sur la même position et fait des discours de motivation pour pousser son champion à briguer un troisième mandat . Dans une lettre publique au président Ouattara dimanche, ce dernier va jusqu’à implorer le chef de l’Etat « d’accepter le sacrifice d’être candidat ». « Le regard des militants se tourne inexorablement vers vous et vous seul » pour « redonner [aux militants] l’espoir que la disparition d’Amadou Gon leur a arraché ». « Il n’y a que votre candidature qui puisse à nouveau rassembler toute la grande famille du RHDP », et « garantir la sécurité, la stabilité et la paix si chères à la Côte d’Ivoire et aux Ivoiriens », dit le texte.
Sur les réseaux sociaux, les organisateurs non identifiés d’une « pétition » pour une candidature de M. Ouattara, qui seraient « des jeunes proches du RHDP », affirment avoir obtenu plus de 700 000 signatures en sept jours. Un chiffre invérifiable mais une initiative qui confirme une tendance.
Cependant, leur position est battue en brèche par Touré Alpha Yaya. Le député de Gbon, anciennement proche de Guillaume Soro, invite Alassane Ouattara à se retirer. Au sein du RHDP, deux tendances se dégagent donc. D’un côté, il y a ceux qui pensent que nul, à part le « Bravetchè », ne peut assurer la victoire au parti et de l’autre les partisans qui sont convaincus que leur leader a droit à un repos bien mérité. Faut-il craindre à une implosion de ce parti cher à Alassane Ouattara ? On semble y aller tout droit.
L’analyste politique Sylvain N’Guessan insiste « les dissensions au sein du RHDP nées de la désignation d’Amadou Gon Coulibaly » comme dauphin, qui ont entraîné le départ de deux fidèles du président, a qui l’on prêtait des ambitions présidentielles, le ministre des Affaires étrangères Marcel Amon-Tanoh, puis le vice-président Daniel Kablan Duncan. « Il sera difficile pour le RHDP de trouver un candidat consensuel en dehors du président Ouattara », note encore Sylvain N’Guessan. De plus, le président a toujours laissé une fenêtre ouverte en disant que, si ceux de sa génération étaient candidats, il pourrait se représenter. »
Alassane Ouattara lui-même ne s’est pas encore exprimé officiellement, mais il s’est confié le 15 juillet au magazine Jeune Afrique. « A l’heure actuelle, compte tenu des délais, je ne vois hélas pas d’autre solution pour préserver la stabilité du pays », a déclaré le président, tout en précisant poursuivre sa réflexion.
L’analyste politique Sylvain N’Guessan rappelle que des dissensions étaient apparues au sein du RHDP après la désignation d’Amadou Gon Coulibaly comme dauphin. Elles ont entraîné le départ de deux fidèles du président, à qui l’on prêtait des ambitions présidentielles, le ministre des affaires étrangères Marcel Amon Tanoh, puis le vice-président Daniel Kablan Duncan.
« Il sera difficile pour le RHDP de trouver un candidat consensuel en dehors du président Ouattara », note M. N’Guessan. De plus, le chef de l’Etat « a toujours laissé une fenêtre ouverte, en disant que si ceux de sa génération étaient candidats, il pourrait se représenter ».
Ce qui est le cas, puisque l’ex-président Henri Konan Bédié, 86 ans, défendra les couleurs du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), principale formation d’opposition. Le Front populaire ivoirien (FPI), de son côté, espère une candidature de l’ancien président Laurent Gbagbo, 75 ans, toutefois hypothéquée par la procédure toujours en cours contre lui à la Cour pénale internationale de La Haye.